Iphigénie, Prisonnière du Foyer
Le soleil cognait sur les ruelles poussiéreuses d'Athènes, tandis qu'Iphigénie, le cœur battant la chamade, serrait nerveusement le bord de son himation (un grand rectangle de tissu drapé servant de vêtement). Ce matin-là, elle avait pris une décision : elle allait demander le divorce à Damon. Mariée depuis cinq ans, elle ne supportait plus son caractère colérique et ses infidélités répétées. Mais dans la cité d'Athéna, la liberté des femmes avait des limites bien définies, et quitter son époux n'était pas chose aisée.
Iphigénie savait qu'elle ne pouvait s'adresser directement à Damon. La loi athénienne, implacable, exigeait qu'elle sollicite l'intervention de son père, Kyros, pour plaider sa cause devant l'archonte, ce magistrat chargé des affaires familiales. L'apolélusi, cette procédure complexe de divorce à l'initiative de la femme, était un véritable parcours du combattant.
Kyros, homme pragmatique et respectueux des traditions, écouta attentivement les doléances de sa fille. Il comprenait sa détresse, mais il savait aussi qu'un divorce pouvait entacher la réputation d'Iphigénie et compromettre ses chances de se remarier. La dot, versée à Damon lors du mariage, constituait un enjeu financier important, et Kyros devait peser le pour et le contre avant de s'engager dans cette procédure.
Le lendemain, Kyros se présenta devant l'archonte, accompagné d'Iphigénie, voilée et silencieuse. Il exposa les raisons du divorce, insistant sur le comportement indigne de Damon. L'archonte, après avoir écouté les deux parties, rendrait sa décision, qui scellerait le destin d'Iphigénie.
Les Chemins Tortueux de la Séparation
Si Damon souhaitait divorcer d'Iphigénie, la procédure aurait été d'une simplicité déconcertante. Un simple mot, aposumpempsis, "je te renvoie", prononcé devant témoins, et le lien conjugal aurait été rompu. Il n'aurait eu qu'à la reconduire chez son père avec sa dot, et la voilà de nouveau femme libre. Mais pour Iphigénie, la route vers la liberté était semée d'embûches, un véritable labyrinthe juridique où son propre désir ne suffisait pas.
Saviez-vous qu'à Athènes, une femme pouvait divorcer... à condition que son père soit d'accord ?
Eh oui, même adulte et mariée, elle restait sous la tutelle masculine. L'apolélusi, cette procédure de divorce à l'initiative de la femme, requérait l'intervention du père, ou à défaut, d'un tuteur légal. Imaginez un peu : devoir convaincre un tiers, aussi proche soit-il, de la légitimité de votre souffrance et de votre désir de quitter votre époux !
Une fois le père convaincu, il devait alors s'adresser à l'archonte, ce magistrat qui réglait les affaires familiales. Devant lui, il exposait les motifs du divorce, qui devaient être sérieux et prouvés : mauvais traitements, adultère de l'époux (l'inverse n'était pas valable, bien sûr !), abandon du domicile conjugal... L'archonte, après avoir entendu les deux parties, rendait son verdict.
On le voit, le divorce en Grèce antique était une affaire d'hommes, où la femme était spectatrice de son propre destin. Une situation qui peut nous sembler inconcevable aujourd'hui, mais qui reflète bien la place secondaire accordée aux femmes dans la société athénienne.
Avant de nous aventurer plus loin dans les méandres du divorce athénien, il faut souligner qu'à côté du mariage traditionnel, avec son cortège de rites et de contrats, existait une forme d'union plus libre, le concubinage.
La femme qui partageait la vie d'un homme sans être son épouse légitime était appelée pallakè. À la différence d'Iphigénie, elle n'apportait pas de dot et ne pouvait donner naissance à des héritiers légitimes. Cette union, précaire par essence, pouvait être rompue à tout moment, aussi facilement qu'elle avait été conclue.
Mais revenons à Iphigénie, notre enguetè gunè, épouse légitime et dotée, dont le destin était scellé par un contrat et des traditions bien plus contraignants. Pour elle, le divorce était loin d'être une simple formalité…
L'homme Maître du Jeu ou Le Divorce à l’Initiative du Mari
Dans ce type d'union plus libre, si Damon s'était lassé d'une pallakè, il aurait pu la renvoyer aussi facilement qu'il l'avait prise. Un simple "je te renvoie", prononcé devant quelques témoins, et l'affaire était réglée. Pas besoin de justifications, pas de recours, pas de complications. La femme retournait chez son père, et Damon était libre de ses mouvements.
Imaginez Iphigénie dans cette situation, à la merci du bon vouloir de Damon. Heureusement pour elle, le mariage lui offrait une certaine protection, même si celle-ci était bien fragile. Car si Damon pouvait répudier une pallakè sans se justifier, il ne pouvait renvoyer Iphigénie aussi facilement. La loi, en exigeant une apolélusi pour dissoudre un mariage légitime, imposait un minimum de formalités et offrait à l'épouse une maigre protection.
Mais ne nous y trompons pas, cette protection était toute relative. L'homme restait maître du jeu. S'il découvrait qu'Iphigénie l'avait trompé, il était légalement tenu de divorcer, et la réputation d'Iphigénie en sortirait ternie. L'absence d'enfant, et plus précisément d'un héritier mâle, pouvait aussi le pousser à la répudier. Dans ce cas, Iphigénie retournerait chez son père, sa dot sous le bras, mais avec une étiquette de "femme stérile" qui la poursuivrait comme une ombre.
Et puis, il y avait les "simples" caprices de Damon. Un nouveau parti plus intéressant, une dot plus consistante, et Iphigénie se retrouverait sur le pavé, sans autre forme de procès. La liberté de l'homme athénien en matière de divorce était presque absolue, transformant la séparation en une véritable répudiation.
Une Exception à la Règle ?
Il faut toutefois nuancer ce tableau quelque peu sombre. La documentation nous révèle quelques cas de divorce qui ressemblent à ce que nous appellerions aujourd'hui un divorce par consentement mutuel.
Prenons l'exemple de Périclès, cette figure emblématique de l'Athènes du Vᵉ siècle avant J.-C. Après avoir eu deux fils avec sa première épouse, une parente qui lui avait déjà donné un héritier lors d'un précédent mariage, il décida de là "céder" à un autre homme. Mais attention, il ne s'agit pas d'un acte unilatéral et brutal. Le texte précise que l'épouse de Périclès était consentante. Peut-être la vie commune était-elle devenue insupportable, ou peut-être Périclès avait-il déjà jeté son dévolu sur une autre...
Car notre grand homme d'État n'a pas perdu de temps pour se recaser avec Aspasie, une femme brillante et indépendante qui a marqué son époque. Aspasie n'était pas athénienne, et leur union, même si elle fut longue et passionnée, ne put être un mariage légitime. Périclès a donc dû divorcer pour vivre avec celle qu'il aimait, même s'il ne pouvait l'épouser officiellement.
On pourrait y voir une forme de respect de la volonté féminine, une exception à la règle patriarcale. Mais ne nous emballons pas trop vite ! Même dans ce cas apparemment harmonieux, c'est bien Périclès qui garde la mainmise sur la situation. En tant que kurios (tuteur légal) de son épouse, c'est à lui que revient le droit de la "donner" en mariage à un autre.
L'histoire de Périclès et de son épouse nous montre que le divorce en Grèce antique pouvait prendre des formes variées, avec des degrés de contrainte plus ou moins marqués. Mais elle nous rappelle aussi que la femme, même issue de l'aristocratie, restait soumise à l'autorité masculine, que ce soit celle de son père, de son mari ou même de son ex-mari.
Le divorce de Périclès n'est pas un cas isolé. L'orateur Isée nous rapporte un autre exemple de divorce "amiable", où l'initiative ne vient pas du mari, mais... de la famille de l'épouse !
Imaginez la scène :
Le vieux Ménéklès, marié à une jeune femme qui ne lui a pas donné d'enfant, se lamente sur son sort. Il souhaite que sa femme puisse connaître les joies de la maternité et décide de la "libérer" de leur union stérile. Mais au lieu de la répudier unilatéralement, il s'adresse à ses beaux-frères, leur demandant de la convaincre de divorcer.
La jeune femme, d'abord réticente, finit par accepter. Ménéklès lui restitue sa dot et lui offre même son trousseau et ses bijoux en cadeau d'adieu. Un divorce en douceur, où chacun semble y trouver son compte.
Ces deux cas, celui de Périclès et celui de Ménéklès, illustrent des situations dans lesquelles le divorce, loin d'être un traumatisme, apparaît comme une solution acceptable, voire souhaitable, pour les deux parties. Mais attention, il ne faut pas se leurrer : ces "divorces amiables" restent l'exception plutôt que la règle.
Dans la majorité des cas, le divorce en Grèce antique est une affaire d'hommes, où la femme a peu de poids dans la décision finale. Et même lorsque son consentement est requis, comme dans l'histoire de Ménéklès, on peut se demander si elle est vraiment libre de choisir, ou si elle ne cède pas à la pression de sa famille et des conventions sociales.
Le Divorce à l’Initiative de l’Épouse
Revenons à Iphigénie, notre Athénienne en détresse. Si Damon refusait de la laisser partir, la loi lui offrait une dernière issue : l'action en justice. Elle pouvait déposer une plainte écrite, une graphê apoleipsis, auprès de l'archonte, ce même magistrat qui avait entendu les doléances de son père.
Mais là encore, le parcours était semé d'embûches. Car Iphigénie, en tant que femme, n'avait pas le droit d'agir seule en justice. Elle devait être représentée par son kurios, son tuteur légal... qui n'était autre que son mari ! Une situation kafkaïenne, n'est-ce pas ?
On imagine aisément la difficulté pour Iphigénie d'obtenir gain de cause dans de telles conditions. Il fallait qu'elle trouve un moyen de contourner cette contradiction juridique, peut-être en s'appuyant sur le soutien de son père ou d'un autre membre masculin de sa famille.
Les historiens ne connaissent que trois cas de divorce à l'initiative d'une femme dans toute la documentation antique. Cela nous donne une idée de la rareté de telles démarches et des obstacles que les femmes devaient surmonter pour faire entendre leur voix.
Il est probable qu'Iphigénie, comme beaucoup d'autres avant elle, ait dû quitter le domicile conjugal pour se réfugier chez ses parents, qui auraient alors pu la soutenir dans sa démarche. Une décision lourde de conséquences, qui la coupait de son mari et de sa vie antérieure, mais qui lui offrait une chance de se libérer d'une union malheureuse.
Même lorsque la femme parvenait à saisir l'archonte, les difficultés ne s'évanouissaient pas pour autant. L'histoire d'Hipparétè, épouse du célèbre et volage Alcibiade, nous le prouve.
Hipparétè, femme de bonne famille, supportait mal les infidélités répétées de son époux, qui fréquentait ouvertement des courtisanes. Excédée, elle décida de le quitter et de se réfugier chez son frère. Alcibiade, indifférent, continua à mener sa vie de débauche.
Mais Hipparétè n'était pas femme à se laisser abattre. Elle osa franchir le pas et déposa une demande de divorce auprès de l'archonte. Plutarque, qui nous rapporte cette anecdote, précise qu'elle dut se présenter en personne devant le magistrat, sans l'intermédiaire de son père ou d'un autre homme.
Imaginez la scène : Hipparétè, courageuse et déterminée, se tient devant l'archonte, prête à plaider sa cause. Soudain, Alcibiade fait irruption, la saisit par le bras et la traîne à travers l'agora, sous les yeux médusés de la foule. Personne n'ose intervenir. Hipparétè est contrainte de retourner au domicile conjugal.
Cet épisode nous montre à quel point la femme athénienne était vulnérable, même lorsqu'elle tentait de faire valoir ses droits. La violence d'Alcibiade, loin d'être condamnée, fut même jugée "conforme à la loi et à l'humanité". Car la présence de l'épouse devant l'archonte visait avant tout à permettre au mari de la réconcilier avec lui et de la retenir.
L'histoire d'Hipparétè soulève de nombreuses questions. La femme pouvait-elle vraiment agir seule en justice en matière de divorce, ou devait-elle obligatoirement recourir à la médiation de sa famille ? Plutarque est le seul auteur à mentionner cette obligation de comparution personnelle, ce qui laisse planer le doute.
Quoi qu'il en soit, une chose est certaine : divorcer était beaucoup plus compliqué pour une femme que pour un homme. Non seulement la procédure était plus lourde, mais elle exposait la femme à des risques de représailles de la part de son mari.
Et même si l'archonte prononçait le divorce, le mari pouvait faire appel de la décision.
Le Divorce à l’Initiative du Père
L'autorité du père, nous l'avons vu, jouait un rôle crucial dans la vie d'une femme athénienne, y compris en matière de divorce. Mais ce pouvoir paternel pouvait se retourner contre l'épouse.
En effet, le père (ou à défaut, un autre parent masculin) pouvait exercer un droit appelé aphérèse, c'est-à-dire le droit de "reprendre" sa fille ou sa parente mariée. Imaginez : vous êtes mariée, vous avez construit une vie avec votre époux, et soudain, votre père débarque et vous annonce que vous devez divorcer pour épouser un autre homme !
Ce droit d'aphérèse, aussi surprenant soit-il, illustre bien la conception patriarcale du mariage en Grèce antique. La femme n'était pas seulement l'épouse de son mari, elle restait aussi la fille de son père, soumise à son autorité.
Bien entendu, l'aphérèse était un acte grave, qui ne pouvait être exercé que pour des motifs sérieux : mauvais traitements de la part du mari, stérilité du couple, opportunité d'un mariage plus avantageux... Le père devait même se faire assister de témoins lorsqu'il venait "récupérer" sa fille, tant cette intervention pouvait être source de conflits.
L'aphérèse nous rappelle que le lien entre un père et sa fille ne se rompait jamais complètement, même après le mariage. La femme appartenait à la fois à deux familles, ce qui pouvait créer des situations complexes et ambiguës.
Il semble toutefois que ce droit d'aphérèse s'éteignait à la naissance d'un fils. Une fois que l'épouse avait donné un héritier à son mari, son intégration dans la famille de celui-ci était considérée comme définitive, et son père perdait son droit de la "reprendre".
Enfin, mentionnons un cas particulier : celui de la fille épiclère. Il s'agit d'une fille unique (ou dont les frères sont décédés) qui hérite des biens de son père. Si elle est mariée, elle est tenue de divorcer pour épouser son plus proche parent masculin, afin de maintenir les biens dans la famille. Une contrainte supplémentaire qui pesait sur le destin des femmes athéniennes.
Un Droit Inégalitaire
Au final, le divorce en Grèce antique, et plus particulièrement à Athènes, était-il une pratique courante ou une exception ? Les historiens ne sont pas tous d'accord sur ce point.
Certains, comme Louis Cohn-Haft, estiment que les mariages étaient plutôt stables et que les divorces étaient rares. D'autres relèvent que les nombreux cas mentionnés dans les discours des orateurs attiques prouvent que la séparation n'était pas un phénomène marginal.
Il est vrai que les sources dont nous disposons ne nous permettent pas de quantifier précisément le nombre de divorces. Mais une chose est certaine : le droit athénien, en matière de divorce comme dans bien d'autres domaines, était profondément inégalitaire.
L'apopempsis, cette simple répudiation prononcée par le mari, contrastait cruellement avec la complexité de l'apolélusi, la procédure de divorce à l'initiative de la femme. Quant à l'aphérèse et à l'épidicasie, elles montraient bien que la femme, même mariée, restait sous la tutelle des hommes de sa famille.
Comme le souligne l'historienne Aurélie Damet, "l'existence d'une procédure permettant à une épouse de demander le divorce ne doit pas cacher l'évidente inégalité entre hommes et femmes". Il fallait des "très bonnes raisons" pour qu'une femme puisse obtenir gain de cause.
Le divorce en Grèce antique nous offre ainsi un prisme intéressant pour observer la place des femmes dans la société athénienne. Un miroir qui reflète les inégalités et les contraintes qui pesaient sur elles, mais aussi leur capacité à résister et à faire entendre leur voix, malgré les obstacles.
Au-delà d'Athènes - d'Autres Règles du Jeu Pour le Divorce
Athènes n'était pas la seule cité grecque à avoir légiféré sur le divorce. En Crète, à Gortyne, une inscription monumentale gravée sur des blocs de pierre nous offre un précieux témoignage sur le droit en vigueur au Vᵉ siècle avant J.-C.
Ce véritable code de lois, loin d'être exhaustif, aborde toutefois la question du divorce, et ce, de manière plus équilibrée que le droit athénien.
À Gortyne, l'épouse pouvait agir seule en justice, sans avoir besoin de l'autorisation de son père ou de son mari. En cas de divorce, elle conservait sa dot et recevait même la moitié des tissus qu'elle avait confectionnés pendant son mariage. Mieux encore, si le divorce était motivé par une faute de l'époux (adultère, violence...), elle avait droit à une indemnité.
On le voit, la condition de la femme divorcée était nettement plus favorable à Gortyne qu'à Athènes. Cela nous montre que les mœurs et les lois pouvaient varier considérablement d'une cité à l'autre.
Un autre exemple nous est fourni par la législation de Charondas, un législateur archaïque qui a exercé son influence dans le sud de l'Italie. D'après l'historien Diodore de Sicile, un amendement à cette législation interdisait à une femme divorcée de se remarier avec un homme plus jeune. Cette disposition visait sans doute à protéger les jeunes hommes des femmes expérimentées et potentiellement manipulatrices.
Il est fort probable que d'autres cités grecques aient eu leurs propres lois sur le divorce, mais les sources manquent pour les connaître avec précision. Le code de Gortyne et la législation de Charondas nous rappellent toutefois que le droit athénien, autant important soit-il, ne représentait qu'une facette de la réalité du monde grec à l'époque classique.
Le Divorce dans L'Égypte Hellénistique
Pour compléter notre panorama du divorce en Grèce antique, il faut nous pencher sur le cas de l'Égypte hellénistique. Sous l'influence de la culture grecque, mais aussi des traditions égyptiennes, le divorce y prend une forme particulière.
Dès le IIe siècle avant notre ère, hommes et femmes pouvaient demander le divorce. Un acte officiel était alors rédigé pour annuler le contrat de mariage et définir les conditions de la séparation. Comme à Athènes, le mari devait restituer la dot, sauf si la femme était reconnue coupable d'une faute.
Fait intéressant, les contrats de mariage anticipaient souvent l'éventualité d'un divorce en précisant les modalités de partage des biens. Une sorte de "clause de divorce" avant l'heure !
L'influence du droit égyptien sur ces pratiques est probable, mais difficile à évaluer avec précision.
Quant au droit d'aphérèse, ce fameux droit du père de "reprendre" sa fille mariée, il semble avoir existé aussi en Égypte. Un exemple célèbre nous est fourni par Ptolémée VI, qui n'hésita pas à reprendre sa fille Cléopâtre Théa à son premier mari pour la donner à un autre, plus avantageux politiquement. Une histoire qui nous rappelle que les rois et les reines n'étaient pas à l'abri des jeux de pouvoir et des alliances matrimoniales, même en matière de divorce.
L'Héritage Antique — Entre Continuité et Rupture
Le divorce en Grèce antique, loin d'être un sujet poussiéreux et révolu, nous interpelle encore aujourd'hui. Il nous invite à réfléchir sur l'évolution des mœurs, sur la place des femmes dans la société, sur les rapports de force au sein du couple.
Si les lois et les mentalités ont bien changé depuis l'époque classique, certains échos du passé résonnent encore dans nos sociétés modernes. L'inégalité entre hommes et femmes, même si elle est moins flagrante qu'autrefois, n'a pas complètement disparu. Les violences conjugales, les pressions familiales, les difficultés financières sont autant d'obstacles que les femmes doivent encore surmonter pour accéder à une véritable liberté de choix.
Le divorce en Grèce antique nous rappelle aussi que le mariage, cette institution apparemment universelle, peut prendre des formes très diverses. À Athènes, il était avant tout un contrat entre deux familles, visant à assurer la perpétuation de la lignée et la transmission des biens. L'amour, même s'il n'était pas absent, n'était pas le fondement principal de l'union.
Aujourd'hui, le mariage est davantage perçu comme une union libre et choisie, fondée sur l'amour et l'épanouissement personnel. Le divorce, loin d'être un tabou, est devenu une réalité sociale acceptée, voire banalisée.
Mais cette évolution ne doit pas nous faire oublier les combats menés par les générations précédentes pour obtenir le droit de divorcer et l'égalité entre hommes et femmes. L'histoire du divorce en Grèce antique nous invite à chérir ces conquêtes et à continuer à lutter contre toutes les formes d'injustice et de discrimination.
Références:
Mossé, Claude/ La Femme dans la Grèce antique. Complexe, 1991.
Schaps, David M. /Economic Rights of Women in Ancient Greece. Edinburgh University Press, 1979.
Damet, Aurélie / "La septième porte. Les conflits familiaux dans l'Athènes classique". Publications de la Sorbonne, 2009.
Cohn-Haft, Louis / "Divorce in Classical Athens". Journal of Hellenic Studies, vol. 115, 1995, pp. 1-14.
Willetts, R. F. /The Law Code of Gortyn. Walter de Gruyter, 1967
Thompson, Dorothy J. /Memphis under the Ptolemies. Princeton University Press, 1988
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